Où en est le niveau du peloton amateur ?

Crédit photo Aurélien Regnoult - DirectVelo
Au fil des années, il est courant d'entendre que le niveau amateur baisse. Avec moins de passages chez les pros, moins de coureurs de premier plan qui sortent des rangs amateurs, puisque ceux-ci sont détectés jeunes et s'inscrivent directement au sein des équipes réserves de structures professionnelles... Les N1 doivent de plus en plus s'adapter pour continuer d'exister et maintenir un bon niveau dans le peloton. Car selon les points de vue et les indicateurs, le niveau amateur n'est peut-être pas autant en baisse que ce que l'époque pourrait laisser croire. "Le niveau amateur est toujours très haut. On le voit, ça roule très vite, il y a de belles courses. Une étape comme à Château-Chinon au TNM, il n'y a pas d'écart. Ça veut dire que tout le monde est bien préparé, bien entraîné, affûté. C'est pour ça que le niveau est très homogène, mais vers le haut", commence par analyser Nicolas Vogondy.
DES AMATEURS « PAS À LA RUE » FACE AUX RÉSERVES
Benjamin Vidal et le CC Etupes ont changé la façon de composer leur effectif pour garder un haut niveau. "Il faut plutôt regarder les N2 et les N3, quand on voit comment ils travaillent. Tout le monde est au millimètre et s’entraîne comme un pro. Quand on voit des courses très dures qui arrivent avec des groupes de 80, c'est que le niveau est très homogène et très élevé. En N1 avant, on pouvait se permettre d'avoir peut-être 30 mecs. À Etupes, on n’est que treize. On diminue la quantité et on va chercher plus de qualité". Les Classe 2 sont un bon indicateur pour s'en rendre compte. "On n'est pas du tout à la rue. À l'Alpes Isère Tour, il y a encore des équipes dévo qui sont venues nous féliciter de notre niveau parce qu'ils voyaient bien qu'il n'y avait pas tellement de différence avec eux. Je trouve que cette année, il y a moins de gros favoris, c’est assez ouvert, c’est intéressant", estime Antoine Bravard.
Depuis plusieurs années, l'émergence des équipes réserve impacte le monde amateur. "Les équipes dévo forment de bons coureurs, nous aussi. Je pense qu'il y a un équilibre qui est en train de se trouver, à voir comment ça va évoluer dans le temps", s'interroge Guillaume Souyris. Sébastien Hoareau, du VC Villefranche Beaujolais, n'est pas forcément d'accord avec le directeur sportif dijonnais. "Ça ne nous aide pas. On nous prend, entre guillemets, nos meilleurs coureurs. Certains se retrouvent à descendre chez nous parce que l'apprentissage a été trop violent". Pour Denis Repérant, les amateurs n'ont pas à rougir face aux dévos. "Je ne trouve pas qu'elles soient écrasantes. Certains sont très jeunes et manquent encore de maturité pour être vraiment performants. On se rend compte que si on les met en Élite, ils ne sont même pas au niveau des meilleurs amateurs".
DU PROGRÈS ET DES RECRUTEMENTS MALINS POUR EXPLIQUER LA VITESSE CROISSANTE
Mais le niveau amateur n'est peut-être pas intrinsèquement meilleur. Pascal Harnois s'interroge sur l'impact du progrès. "Tout le monde a les outils pour tirer un maximum de ses capacités, ce qui n'était pas forcément le cas il y a quelques années. Il y a l'apport technique et l’entraînement qui font rouler plus vite. Mais, est-ce que les meilleurs de cette période sont meilleurs que ceux d'il y a cinq ans ? Je n'en suis pas persuadé", s'interroge le directeur sportif du VC Pays de Loudéac. Jean-Philippe Yon lui répond en évoquant le même argument. "Il y a une évolution sur le matériel, sur l'aéro, sur les braquets, sur les entraînements. Il y a de plus en plus d'arrivées au sprint. C'est beaucoup plus structuré que par le passé. On court vraiment plus comme des professionnels. Après, on sait bien qu'il y a un déficit. Il y a de moins en moins de coureurs à la base. Forcément, leur niveau est de moins en moins haut, mais le niveau global reste très bon quand même".
Le VC Rouen 76 est un bon exemple d'équipe amateur cohérente avec son temps. Les jeunes étant plus durs d'accès, Jean-Philippe Yon et son équipe visent d'autres profils. "Il y a des coureurs qui passent aussi à travers les mailles du filet et qui ne sont pas dans un circuit précoce. On peut prendre un Léandre Huck ou un Guillaume Adam, qui sont aujourd'hui d'excellents coureurs, qui ont eu des parcours complètement différents. Un Matthew Fox, qui a commencé le vélo à 20 ans et qui est aujourd'hui hyper performant. On a trois exemples chez nous. Et c'est là que le bon sens doit venir d'équipes comme la nôtre, en donnant une chance à ces coureurs qui ne sont pas forcément précoces et qui ne sont pas dans les radars des équipes professionnelles à 18 ans". Les meilleurs amateurs sont donc peut-être plus âgés, mais pas moins rapides.
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